Les opérateurs de supermarchés doivent être vigilants: bientôt, le législateur belge va interdire les clauses spécifiques en vue de bannir les contrats déséquilibrés dans le secteur des supermarchés

Le 5 avril 2024, le conseil des ministres a approuvé un projet d’Arrêté royal complétant le Code de droit économique. Cet AR devra mieux protéger les exploitants indépendants des supermarchés contre les clauses déséquilibrées figurant dans les contrats de franchise avec les chaînes de supermarchés à l’avenir.

Cet article vise à expliquer (i) quelles sont les clauses qui sont en tout état de cause illicites – et seront donc considérées comme nulles sans autre forme de procès – et (ii) quelles sont les clauses qui sont illicites, sauf si le franchiseur réussit à prouver le contraire.

Liste noire des clauses illicites dans les contrats de franchise

L’Arrêté royal liste quatre clauses qui seront dans tous les cas interdites pour protéger le franchisé et l’exploitant indépendant de supermarché. Il s’agit des clauses suivantes:

  • Les clauses visant à refuser ou à limiter de manière inadaptée au franchisé ou à l’exploitant indépendant de supermarché la possibilité d’être dédommagé ou le droit de pouvoir d’approvisionner chez des tiers, si le franchiseur n’a pas respecté ou pas correctement la livraison de marchandises ou de services.

Charles Claeys: «La continuité du magasin est essentielle. Si la chaîne de supermarché ne livre pas les produits (à cause de grèves ou de négociations difficiles des prix avec les producteurs), alors vous pourrez grâce à l’AR vous approvisionner ailleurs sans problème.»

  • Les clauses qui visent à faire supporter au franchisé ou à l’exploitant indépendant de supermarchés plus de la moitié des frais découlant de la réalisation et de la mise en œuvre des actions de promotion imposées par le franchiseur.

Lisa Opdecam: «Le franchisé supporte des risques financiers importants. Sa rentabilité est mise sous pression en raison des prix de vente maximaux imposés, de la gamme de produits fixes et de l’obligation d’offrir toutes sortes de promotions. Pour mieux protéger les exploitants indépendants de supermarchés, le législateur belge impose au franchiseur (entre autres) de supporter la moitié du coût des promotions qu’il impose.»

  • Les clauses qui limitent le droit du franchisé à entamer des négociations à la fin de la collaboration de franchise, pendant la période de préavis ou la durée d’une clause de non-concurrence.

Charles Claeys: «Tout le monde a le droit de faire des affaires. Il n’est pas possible qu’un franchisé ne puisse pas se préparer à rejoindre une chaîne concurrente, à la fin du partenariat. L’AR n’interdit toujours pas les clauses dites de non-concurrence. La vigilance reste donc de mise.»

  • Les clauses indiquant que seul le tribunal du siège social du franchiseur est habilité à statuer sur un litige.

Lisa Opdecam: «Tout comme c’est le cas en droit locatif, le tribunal compétent sera celui du lieu où l’activité commerciale est exercée. De cette manière, l’exploitant indépendant de supermarché peut s’adresser au tribunal le plus proche en cas de litige.»

 

Liste grise des clauses illicites dans les contrats de franchise

D’autre part, le législateur belge estime que les clauses suivantes sont illicites et donc nulles et non avenues, à moins que le franchiseur ne puisse fournir une réfutation juridiquement décrite:

  • Les clauses déterminant une évaluation forfaitaire du fonds de commerce dans les cas où le franchiseur souhaite le reprendre au franchisé, à moins que cette valeur ne corresponde à ce que le franchisé recevrait pour ce fonds dans des circonstances normales.

Charles Claeys: «Il n’est pas logique, lors de la conclusion du contrat de franchise, de déterminer immédiatement une évaluation immuable de l’affaire. Un exploitant indépendant de supermarché travaille durement, investit et prend des risques. Cela devrait pouvoir avoir un impact positif sur l’évaluation lors de la vente de l’affaire à la fin de sa carrière.»

  • Les clauses qui obligent le franchisé à exploiter une entreprise structurellement déficitaire pendant au moins 12 mois, sans prévoir de délai de préavis pouvant aller jusqu’à quatre mois pour l’acquéreur du droit et sans compensation supplémentaire.

Lisa Opdecam: «Inutile d’enfoncer encore plus le couteau dans la plaie. Si l’exploitant indépendant de supermarché subit des pertes, il doit avoir la possibilité d’y mettre fin à brève échéance. Dans le cas contraire, les pertes ne vont faire que s’accumuler et qui en profite alors?»

  • Les clauses qui donnent au franchiseur le droit de mettre fin à la collaboration commerciale avec l’application d’une clause résolutoire expresse.

Charles Claeys: «Les contrats avec des chaînes de supermarchés comprennent souvent des clauses qui permettent de mettre fin à la collaboration (par exemple, en cas de défaillance contractuelle ou de certaines situations défavorables pour les chaînes). Ces clauses peuvent avoir leur utilité, mais les chaînes de supermarchés devront à l’avenir justifier la fin d’une collaboration et offrir aux exploitants indépendants la possibilité de rectifier leurs erreurs.»

 

Entrée en vigueur

Le projet d’Arrêté royal a été provisoirement approuvé par le conseil des ministres. Le Conseil d’État doit rendre son avis avant le 5 mai 2024. L’entrée en vigueur de l’AR est prévue pour le second semestre 2024.

 

Conclusion

Cette nouvelle législation vise à protéger davantage la liberté d’entreprendre de l’exploitant indépendant de supermarché, tant pendant qu’après la fin du contrat de franchise en limitant les risques financiers encourus par les exploitants indépendants de supermarché et en facilitant une sortie possible du statut.

En tant que franchiseur, vous devez donc être vigilant à chaque conclusion de contrat puisqu’une clause illicite peut ici aussi provoquer la nullité de la clause, avec toutes les conséquences pratiques et financières négatives supplémentaires.

En tant que franchiseur, il est par ailleurs important d’être au courant des clauses illicites éventuelles afin de ne pas prendre de risques pratiques ou financiers inutiles pendant l’exploitation d’un supermarché. Les organisations du secteur conseillent donc aux franchisés de ne pas signer de contrat de franchise pour le moment, avant que le nouvel AR ne sorte ses effets.

Nous sommes heureux de vous conseiller et de vous aider.

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