Règlement sur les obligations vertes européennes

Obligations vertes, Pacte vert Européen, Écoblanchiment… ? Voilà des termes que nous entendons souvent actuellement. Mais que signifient-ils et, surtout, quelle est leur place dans le paysage juridique européen?

Les obligations vertes diffèrent des obligations classiques par le fait qu’elles financent exclusivement des projets respectueux de l’environnement. En ce sens, elles représentent un instrument majeur pour financer les investissements dans les technologies vertes et les projets durables.

Récemment, un nouveau règlement du Parlement européen et du Conseil est entré en vigueur, à savoir le Règlement (UE) 2023/2631 du Parlement européen et du Conseil du 22 novembre 2023 sur les obligations vertes européennes et la publication facultative d’informations pour les obligations commercialisées en tant qu’obligations durables sur le plan environnemental et pour les obligations liées à la durabilité («Règlement sur les obligations vertes européennes»).

Ce Règlement  vise à promouvoir la finance durable en établissant un ensemble d’exigences uniformes pour les obligations vertes, et plus spécifiquement, pour l’utilisation du label «Obligation verte européenne».

Conditions d’émission d’une obligation verte européenne

Le titre II du Règlement sur les obligations vertes européennes fixe diverses conditions à l’utilisation du label «Obligation verte européenne» («EuGB», en abrégé).

La première concerne l’utilisation des produits des obligations vertes européennes, qui doivent être affectés dans leur intégralité à une activité environnementale durable. Comme le définit le Règlement Taxinomie, une activité est considérée comme durable lorsqu’elle (i) contribue de manière substantielle à un ou plusieurs objectifs environnementaux (ii) ne cause de préjudice important à aucun des objectifs environnementaux, (iii) est exercée dans le respect des garanties minimales, ou (iv) est conforme aux critères techniques de sélection établis par la Commission.

Ces produits doivent être affectés à l’une ou plusieurs des catégories suivantes:

  • Immobilisations qui ne sont pas des actifs financiers;
  • Certaines dépenses d’investissement;
  • Certaines dépenses de fonctionnement qui ont été engagées au maximum trois ans avant l’émission de l’obligation verte européenne;
  • Actifs financiers créés au maximum cinq ans après l’émission de l’obligation verte européenne;
  • Patrimoine et dépenses des ménages.

Toutefois, le Règlement sur les obligations vertes européennes se montre flexible sur cette utilisation, puisqu’il prévoit qu’une marge de 15% des produits peut être allouée à des activités qui répondent à la définition d’une activité durable sur le plan environnemental, mais qui ne sont pas encore couvertes par le Règlement Taxinomie.

Pour répondre notamment aux objectifs généraux fixés par le Pacte vert Européen, le Règlement sur les obligations vertes européennes a pour objectif de permettre aux investisseurs et aux entreprises d’identifier plus facilement les investissements durables du point de vue de l’environnement et de garantir leur crédibilité. À cet égard, la deuxième condition d’utilisation du label «Obligation verte européenne» est la transparence et l’examen externe.

Le texte prévoit un certain nombre de formalités à accomplir a priori et a posteriori de l’émission de l’obligation. Avant d’émettre une obligation verte européenne, l’émetteur doit remplir une fiche d’information EuGB et entreprendre une évaluation préalable à l’émission, impliquant un examen par un évaluateur externe qui doit aboutir à une décision positive.

Une fois l’obligation verte européenne émise, l’émetteur établit d’abord un plan CapEx, qui précise la date limite à laquelle toutes les dépenses d’investissement et d’exploitation financées par l’obligation verte européenne doivent être alignées sur la taxonomie. Deuxièmement, tous les douze mois, l’émetteur doit établir un rapport d’allocation prouvant que le produit de son obligation a été alloué conformément aux exigences du titre II, en ce compris une déclaration sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre du plan CapEx. Troisièmement, une fois que les produits de l’obligation ont été entièrement alloués, l’émetteur rédige un rapport sur l’impact environnemental de l’utilisation des produits de l’obligation.

Dans un souci de transparence et d’information, il est également requis de publier un prospectus conformément au Règlement 2017/1129 (« Règlement Prospectus »), dans lequel l’émetteur indique que son obligation est une «obligation verte européenne» et qu’elle est émise conformément au Règlement sur les obligations vertes européennes. Afin de permettre à quiconque d’obtenir des informations concernant les obligations, l’émetteur doit publier sur son site Internet tous les documents et informations susmentionnés et notifier cette publication tant aux autorités de contrôle compétentes (en Belgique: FSMA) qu’à l’autorité européenne des marchés financiers (« ESMA »).

 

 Contrôle parallèle ESMA – FSMA?

Le Règlement introduit un nouveau système d’enregistrement, de contrôle et de communication des informations. Par souci d’efficacité, ces contrôles sont effectués au niveau national, par exemple en Belgique, par la FSMA.

Ces autorités ont des pouvoirs de surveillance et d’enquête. En résumé, la FSMA veillera, le cas échéant en collaboration avec d’autres autorités ou à travers des délégations à celles-ci, au respect des exigences du Règlement sur les obligations vertes européennes. Afin d’accroître la confiance des investisseurs, les autorités peuvent, mais pas exclusivement:

  • Exiger de l’émetteur qu’il publie diverses informations et documents;
  • Exiger de l’émetteur qu’il notifie cette publication à l’autorité compétente;
  • Suspendre ou interdire l’offre ou l’admission à la négociation sur un marché réglementé d’obligations vertes européennes qu’elles soupçonnent de ne pas être conforme aux exigences du Règlement;
  • Suspendre ou interdire les communications promotionnelles lorsqu’ellent soupçonnent un écoblanchiment;
  • Interdire temporairement à l’émetteur d’émettre des obligations vertes européennes.

Parallèlement, l’ESMA a accordé des compétences spécifiques concernant le rôle et la capacité des réviseurs externes qui peuvent formuler des demandes d’information, des enquêtes générales et des inspections. Dans une certaine mesure, l’ESMA détient également des pouvoirs de sanction.

La cheminement de ce Règlement sur les obligations vertes européennes n’est pas encore terminé. Il est entré en vigueur le 20 décembre 2023, mais ses dispositions ne s’appliqueront qu’à partir du 21 décembre 2024.

En outre, le Règlement sur les obligations vertes européennes s’appuie dans une large mesure sur la classification des secteurs d’activité prévue par le Règlement Taxinomie. Ce Règlement continue de susciter des débats au sein des États membres de l’UE, notamment en ce qui concerne la question du nucléaire. À titre d’exemple, l’Allemagne soutient le point de vue selon lequel l’énergie nucléaire ne devrait pas être considérée comme une source d’énergie durable, alors qu’elle est actuellement classée comme telle dans le cadre du Règlement Taxinomie. L’Autriche a également publié une déclaration dans laquelle elle considère que le fait de considérer l’énergie nucléaire comme une énergie verte équivaut à de l’écoblanchiment.

En conclusion, bien qu’il dépende d’autres instruments existants tels que le Règlement Taxoinomie, le Règlement sur les obligations vertes européennes établit un cadre assez précis pour l’émission d’obligations vertes européennes. Toutefois, il faut garder à l’esprit que les véritables défis de ce Règlement émergeront lorsqu’il sera applicable et mis en œuvre dans la pratique.

 

 La présente lettre d’information se fonde sur des informations mises à jour jusque mai 2024. La présente contribution est donc basée sur des informations actuelles, et est, bien sûr, sujette à changement.

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