Un nouveau code était-il nécessaire?
C’est bien entendu la première question qui vient à l’esprit de beaucoup. Le législateur avait un objectif noble en tête : moderniser le droit, renforcer la sécurité juridique et la prévisibilité, assurer une meilleure structure et introduire des innovations dans un certain nombre de domaines où la jurisprudence était incertaine ou peu claire.
Une intention justifiée, car le régime extracontractuel existant ne consistait qu’en une poignée de dispositions légales (articles 1382-1386bis de l’ancien Code civil), faisant du droit belge de la responsabilité un droit essentiellement jurisprudentiel. Cela menait à de l’incertitude juridique, renforcée par une jurisprudence manquant de clarté, divergente et dépassée à certains égards.
Innovation majeure: suppression de la quasi-immunité de l’agent d’exécution
La modification de la responsabilité de l’agent d’exécution constitue certainement une innovation majeure. Un agent d’exécution ou un auxiliaire est une personne qui se substitue à un contractant dans l’exécution d’une obligation contractuelle. Supposons que vous concluez un contrat avec un entrepreneur qui fait appel à un électricien indépendant pour l’exécution de travaux d’électricité. Lorsqu’un dommage survient à la suite d’une erreur de l’électricien, la question se pose de savoir à qui le client doit adresser ses réclamations : à l’entrepreneur, à son agent d’exécution ou aux deux?
Compte tenu de la relation contractuelle entre le maître d’ouvrage et l’entrepreneur, ce dernier est en principe responsable de l’erreur commise par l’agent d’exécution.
L’électricien lui-même ne peut être poursuivi personnellement (hors contrat) par le client que dans des conditions très strictes. La première condition concerne la faute qui doit constituer une violation, non pas d’une obligation contractuelle, mais de la norme générale de diligence. La deuxième condition prévoit que le dommage causé par le fait doit être différent de celui résultant de la seule exécution défectueuse du contrat.
En assimilant l’électricien auxiliaire à son cocontractant (entrepreneur), l’action en responsabilité extracontractuelle du créancier principal (client) à l’encontre de l’électricien auxiliaire a été fortement réduite. On parlait donc d’une «quasi-immunité» de l’agent d’exécution.
Le nouveau Livre 6 du Code civil supprime cette quasi-immunité de l’agent d’exécution. Dans le cas présent, le donneur d’ordre a la possibilité d’obtenir des dommages-intérêts à la fois 1) auprès de son propre cocontractant et 2) auprès de l’auxiliaire qui a été engagé pour exécuter le contrat.
Ce nouveau règlement a évidemment des implications importantes pour les chefs d’entreprise, les employés, les sous-traitants, etc. Leur protection est réduite dans ce domaine. Néanmoins, il convient également de faire preuve de nuance. Ainsi, la nouvelle loi prévoit que ce dispositif ne s’applique que lorsque la loi ou le contrat n’en dispose pas autrement, ce qui permet des dérogations.
Autres nouveautés
En outre, le législateur a modifié les concepts fondamentaux de faute, de dommage et de causalité qui constituent les éléments de base de la responsabilité non contractuelle d’une personne. Un article est consacré à la restauration en nature comme alternative à l’indemnisation.
Les règles s’appliquent aux personnes physiques et morales. Pour la responsabilité sans faute pour les marchandises défectueuses (ancien art. 1384 [1] CC), le critère de sécurité est explicitement inclus dans la loi. La législation sur la responsabilité du fait des produits ne sera pas modifiée, mais pleinement intégrée dans le nouveau Livre 6 du Code civil. Ce ne sont là que quelques-unes des nouveautés introduites par le Livre 6 du Code civil.
Le nouveau droit s’appliquera aux faits survenus après son entrée en vigueur, c’est-à-dire le 1er janvier 2025. Cela signifie que les nouvelles règles peuvent s’appliquer à des contrats préexistants. Il convient donc de procéder à une révision de vos contrats existants. Par exemple, les réclamations extracontractuelles directes à l’encontre des auxiliaires peuvent être limitées/exclues contractuellement (par exemple, dans le contrat principal ou dans les conditions générales).
La signification concrète de tous ces changements et les mesures supplémentaires que votre entreprise peut prendre pour s’adapter à l’évolution de la législation seront abordées dans les prochaines lettres d’information afin que vous soyez parfaitement informé. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez des questions ou si vous souhaitez obtenir des conseils.