Donner ou hériter d’une entreprise familiale : cela peut être fiscalement avantageux
Pour soutenir la continuité des entreprises familiales et garantir un emploi durable, la Région flamande prévoit deux régimes favorables pour la transmission des entreprises familiales.
En matière de droits de donation, une exonération s’applique à la donation (pleine propriété, nue-propriété ou usufruit) des actifs d’une entreprise familiale ou des actions d’une société familiale.
Pour bénéficier de cette exonération, l’entreprise ou la société doit remplir certaines conditions. Tant l’entreprise que la société doivent avoir pour objet et exercice une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ou une profession libérale. Pour les sociétés, des conditions supplémentaires s’appliquent, à savoir (i) avoir un nombre minimum d’actions détenues au sein de la famille et (ii) exercer une activité économique réelle.
Il existe une présomption réfragable qui considère qu’une société n’exerce pas une activité économique réelle lorsque deux paramètres spécifiques des comptes annuels sont remplis, à savoir (i) lorsque les biens immobiliers de la société dépassent 50 % du total des actifs et lorsque, simultanément, (ii) le poste « rémunérations, charges sociales et pensions » représente moins de 1,50 % du total des actifs. Toutefois, la société peut fournir la preuve contraire attestant de l’existence d’une activité économique réelle.
Attention : le fait que votre société ne réponde pas simultanément aux deux paramètres susmentionnés ne signifie pas que vous êtes automatiquement éligible aux régimes favorables. Tout comme vous pouvez apporter la preuve contraire de l’existence d’une activité économique, VLABEL peut également apporter la preuve que la condition d’une activité économique réelle n’est pas remplie.[1]
En matière de droits de succession, le taux pour l’acquisition d’entreprises ou de sociétés familiales est de 3 % (en ligne directe et partenaires) ou de 7 % (autres). Les conditions à remplir sont identiques à celles des droits de donation.
Les sociétés patrimoniales dont l’activité se limite à la gestion passive de biens immobiliers privés sont par définition exclues de ces mesures favorables. Il en va de même pour les sociétés de gestion pure qui ne font que participer à la gestion d’une autre société, sans procéder elles-mêmes à une exploitation axée sur le marché, et pour les sociétés holding qui ne font que détenir et gérer passivement des participations et exécuter les tâches et missions qui en découlent.
1er point d’attention : l’immobilier dans la société (active)
Comme indiqué ci-dessus, les sociétés patrimoniales pures sont exclues du régime favorable. Toutefois, cela ne signifie pas que la détention de biens immobiliers privés par votre société empêche automatiquement l’accès à ce régime.
La jurisprudence récente[2] a confirmé que le régime favorable peut être pleinement appliqué à l’héritage d’actions de sociétés familiales qui ont une activité économique réelle, mais qui possèdent également des terrains ou des bâtiments qui ne sont pas utilisés pour l’activité économique ou qui ne le sont que partiellement. Ainsi, tant que votre société a une activité économique réelle (par exemple, l’exploitation d’une boucherie), le fait qu’elle possède également des biens immobiliers ne doit pas constituer un obstacle.
Si votre entreprise familiale est une entreprise, les règles sont différentes. En effet, pour les entreprises, le régime favorable ne s’applique qu’aux actifs investis professionnellement dans l’entreprise et il y a une exclusion explicite des biens immobiliers utilisés ou destinés principalement à des fins résidentielles.
2e point d’attention : sociétés immobilières
Nous avons déjà abordé la question des sociétés actives qui possèdent également des biens immobiliers (privés) et de leur impact. En outre, il y a eu des évolutions remarquables dans le domaine des sociétés immobilières effectives.
Alors qu’auparavant, VLABEL ne reconnaissait comme activité économique que la location de biens immobiliers à des sociétés du groupe (société mère, filiale ou société sœur) et ce, à condition qu’il n’y ait pas d’autres biens immobiliers, la jurisprudence récente va plus loin. Désormais, il est également admis qu’une société holding qui loue des biens immobiliers de l’entreprise à la fois au sein du groupe et à des tiers (« activité mixte ») peut être considérée comme exerçant une activité économique réelle, notamment lorsque la location de bâtiments d’entreprise dépasse la simple gestion passive de ces biens. C’est le cas lorsque les bâtiments de l’entreprise sont loués professionnellement pour une longue période en vue de l’exploitation économique des locataires.[3]
Récemment, il a également été confirmé que si une société immobilière possède, outre des bâtiments d’entreprise utilisés à des fins professionnelles, des biens immobiliers privés, qu’ils soient ou non loués ou utilisés par l’administrateur, cela n’empêche pas non plus l’application des régimes favorables.[4]
Les sociétés immobilières qui développent des projets sont également éligibles, c’est-à-dire lorsqu’elles génèrent une valeur ajoutée sociale de manière durable. La jurisprudence tient compte à cet égard de la taille des projets, du marché dans lequel les projets s’inscrivent (par exemple, chambres d’étudiants), de l’achat et de la vente réguliers de biens immobiliers et de l’approche professionnelle et structurée.[5]
3e point d’attention : société professionnelle participant à une association
Si vous avez regroupé vos activités de profession libérale (avocat, médecin, kinésithérapeute, architecte) dans une société professionnelle et que vous fournissez, par l’intermédiaire de cette société, des services à une association faîtière (par exemple, une association d’avocats, de kinésithérapeutes, etc.), qui facture ensuite ces services à ses clients, il y a une bonne nouvelle. Le tribunal de première instance de Gand[6] a récemment confirmé qu’une société professionnelle fournit des services économiques même si elle ne facture pas directement ses clients, mais le fait par l’intermédiaire de l’association, et est donc également éligible au régime favorable. Le fait que la société professionnelle soit également actionnaire de l’association dans laquelle elle exerce un mandat d’administrateur non rémunéré ne signifie pas qu’elle doit être qualifiée de société de gestion – sans activité économique réelle.
4e point d’attention : société holding
Comme indiqué ci-dessus, les sociétés holding pures sont exclues des régimes favorables. La situation est toutefois légèrement différente si la société holding détient une participation d’au moins 30 % dans une filiale active ou si elle peut démontrer qu’elle exerce elle-même une activité économique réelle.[7]
Dans le premier cas, c’est-à-dire lorsque la société holding détient une participation d’au moins 30 % dans une filiale active (qualifiée de société familiale), la société holding peut appliquer partiellement les régimes favorables, c’est-à-dire à hauteur de sa participation.
Dans le deuxième cas, tout est encore plus rose. Si la société holding peut démontrer que ses activités dépassent la gestion passive de participations financières et qu’elle a pour objet et exercice une exploitation ou activité effective de nature opérationnelle ou économique, elle sera alors qualifiée de société familiale et pourra donc appliquer les régimes favorables.
5e point d’attention : impact de la réduction de capital suite à une donation ou un décès
Pour conserver l’application du régime favorable, le capital de la société ne peut pas diminuer par le biais de distributions ou de remboursements au cours des trois années suivant la donation ou le décès. Si le capital diminue, le taux normal est alors dû proportionnellement.
La jurisprudence récente[8] confirme que ce calcul proportionnel doit être effectué de la manière suivante : supposons que vous donniez 25 % des actions de votre société familiale. Dans les trois ans qui suivent la donation, le capital de la société est réduit de 40 % et d’un montant de 100 000 euros. Dans ce cas, les droits de donation ordinaires seront dus sur 25 % de cette réduction de capital, soit sur 25 000 euros.
6e point d’attention : changement d’activité de l’entreprise familiale suite à une donation ou un décès
Pour conserver le régime favorable, il faut non seulement que votre entreprise ait une activité économique réelle au moment de la donation ou du décès, mais aussi qu’une activité économique soit maintenue pendant une période d’au moins trois ans. Est-ce que cela signifie la fin de l’histoire si, par exemple, vous avez une société médicale, mais qu’aucun de vos proches n’est médecin et qu’il n’y a donc pas de possibilité de poursuivre cette activité en tant que telle ? Non !
Il a été récemment confirmé qu’il n’est pas nécessaire que la société poursuive la même activité. Tant qu’une activité qualifiée est exercée (c’est-à-dire une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou une profession libérale), le régime favorable peut être maintenu. Ainsi, votre société médicale peut parfaitement continuer à exploiter un salon de coiffure ou une boulangerie.
Le régime favorable est également maintenu si vous donnez ou vendez les actions données ou héritées à un tiers. Toutefois, le cessionnaire doit alors poursuivre une activité économique (mais pas nécessairement la même) pendant la période de trois ans. Dans ce cas, il est conseillé d’inclure dans le contrat de vente des actions une clause stipulant que, si l’acquéreur ne respecte pas cette obligation, il devra payer les droits de succession ou de donation supplémentaires.
Enfin, réfléchissez avant de vous lancer : ruling et/ou attestation ?
Vous pensez que le régime favorable pourrait s’appliquer à votre entreprise familiale ? Dans ce cas, vous avez tout intérêt à demander l’avis juridique de Monard Law. Par ailleurs, il peut également être judicieux de soumettre votre projet d’opération au Service des décisions anticipées afin d’obtenir la certitude que vous êtes éligible ou non au régime favorable.
En outre, avant l’acte authentique de donation, vous pouvez également demander une attestation préalable à VLABEL. Dans cette attestation, VLABEL confirmera si les conditions sont remplies au moment de la demande et sur la base des données que vous avez fournies. À supposer que les données factuelles n’aient pas changé au moment de la donation et que votre entreprise familiale continue à remplir les conditions dans les trois ans suivant la donation, VLABEL doit respecter cette attestation et ne peut donc pas revenir dessus.[9]
Après avoir lu cet article, vous voulez vous atteler à votre succession (familiale) ? Votre expert Monard Law se fera un plaisir de vous rencontrer afin d’étudier avec vous la meilleure solution pour vous et votre entreprise.
[1] Gand 1er octobre 2024
[2] C.C. 23 mars 2023, n° 51/2023.
[3] Gand 19 novembre 2024, 2023/AR/712.
[4] Trib. Gand 9 janvier 2024, 22/2177/A.
[5] Gand 21 juin 2022, 2021/AR/496.
[6] Trib. Gand 9 avril 2024, Rec.gen.enr.not. 2024, liv. 7, 287.
[7] Gand 1er octobre 2024, 2023/AR/304.
[8] Cass. 30 décembre 2024, AR C.23.0443.N.
[9] Trib. Gand 8 octobre 2024, 21/2695/A.