Le nouveau droit de propriété

Trois nouveaux droits des biens sont entrés en vigueur il y a eu un an, le 1er septembre 2022. L’objectif du législateur était de rendre le droit des biens fonctionnel au lieu de purement conceptuel, avec par conséquent la garantie d’une meilleure lecture de la loi entraînant par la suite une plus grande sécurité juridique. Cette lettre d’information aborde brièvement les changements les plus importants en matière de droit de la propriété et leurs conséquences sur un certain nombre de concepts tels que les « nuisances de voisinage », le tant décrié « droit d’échelle » et les servitudes.

1. Points de divergence entre l’article 3.50 du Code civil et l’article 544 de l’ancien Code civil

La définition du droit de propriété se retrouve dans l’article 3.50 du Code civil : « Le droit de propriété confère directement au propriétaire le droit d’user de ce qui fait l’objet de son droit, d’en avoir la jouissance et d’en disposer. Le propriétaire a la plénitude des prérogatives, sous réserve des restrictions imposées par les lois, les règlements ou par les droits de tiers. »

Il convient tout d’abord de noter que les mots « de la manière la plus étendue » sont supprimés et remplacés par les mots « plénitude des prérogatives ». L’article 544 de l’ancien Code civil absolutisait l’exclusivité du droit de propriété par l’utilisation des mots « de la manière la plus absolue ». Le nouveau libellé relativise l’exclusivité du droit de propriété. Ce faisant, le législateur répond à l’évolution du droit de propriété au fil des décennies et à la dématérialisation du droit des biens. La description de l’article 3:50 du Code civil englobe également les biens incorporels et ne se limite donc pas aux biens corporels.

D’autre part, il y a l’insertion du mot « direct », qui indique la nature impécunieuse du droit de propriété. Le droit de propriété est le seul droit réel sur un bien propre et en ce sens le seul droit réel qui a une relation sujet-objet sans équivoque.

Par la suite, on y a ajouté que les droits de tiers peuvent imposer des restrictions. Cette référence aux « droits des tiers » permet de saisir à la fois les droits des tiers auxquels le propriétaire a consenti et les droits des tiers qui sont imposés au propriétaire. Ces « tiers » comprennent donc aussi bien ceux qui ont une relation contractuelle avec le propriétaire, comme les locataires, les preneurs à bail, les usufruitiers, les propriétaires d’immeubles, etc., que ceux avec lesquels le propriétaire n’a pas de relation contractuelle, tels que les voisins, les autorités publiques, les propriétaires fonciers, etc.

Enfin, les trois pouvoirs du propriétaire (usage, jouissance et disposition) sont plus systématiquement juxtaposés, ce qui n’était pas le cas dans l’ancien article 544 du Code civil.

 

2. Nuisances de voisinage

Avant l’entrée en vigueur du Livre 3, il fallait s’inspirer de l’article 544 de l’ancien Code civil et de la jurisprudence. Dans le livre 3, en revanche, le législateur a créé un titre 5 distinct « Relations de voisinage » dans lequel les « Troubles de voisinage » ont reçu leur propre sous-titre à côté de la « clôture mitoyenne » et des « servitudes ». Les troubles de voisinage se retrouvent au paragraphe 1 de l’article 3.101 du Code civil.

Le législateur a répondu au problème bien connu de l’évaluation de la nuisance vécue comme excessive, notamment en intégrant dans la loi une jurisprudence constante en matière de nuisances de voisinage et en fournissant au juge quelques outils. Ainsi, le tribunal doit maintenant considérer toutes les circonstances de l’affaire afin d’évaluer cette nuisance excessive : « il est tenu compte de toutes les circonstances de l’espèce. » En outre, le législateur a également donné quelques exemples de ces circonstances : « tels le moment, la fréquence et l’intensité du trouble, la préoccupation ou la destination publique du bien immeuble d’où le trouble causé provient. »

Celui qui rompt l’équilibre est obligé de le rétablir. L’article 3.101, § 2 du Code civil prévoit un certain nombre de mesures propres à rétablir cet équilibre, étendant ainsi la compétence du juge.

Dans l’art. 3.101, §3 du Code civil, une attention spécifique est accordée aux locataires ou aux titulaires d’autres droits réels et aux maîtres d’ouvrage.

Le délai de prescription de l’action pour trouble excessif de voisinage expire après 5 ans, selon l’article 2226 bis § 1 (1) et (2) de l’ancien Code civil. Le délai de prescription court à partir du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l’identité de la personne responsable.

Il est remarquable que le législateur, à l’article 3.102 du Code civil, donne au tribunal le pouvoir de prendre des mesures préventives à la demande du propriétaire ou de l’utilisateur du bien immobilier voisin. Toutefois, cela n’est possible que si une propriété présente des risques graves et manifestes en matière de sécurité, de santé ou de pollution, créant un déséquilibre par rapport à une propriété voisine. Le but de cette mesure préventive est d’éviter la réalisation d’un risque.

 

3. Récupération d’objets et droit d’échelle

Les grands titres des journaux indiquant que « Le jardin de votre voisin deviendra aussi un peu votre jardin » sont erronés. En effet, la nouvelle loi respecte le droit de propriété et ne vise qu’à résoudre les conflits entre propriétés.

Le propriétaire d’un bien sur lequel un objet ou un animal a atterri doit soit le restituer, soit permettre au propriétaire de cet animal ou de cet objet de l’enlever conformément à l’article 3.67, § 1er du Code civil. Il s’agit donc d’une forme limitée de « se faire justice à soi-même ». Dans le cas où des biens meubles sont incorporés, cela ne s’applique pas, car dans ce cas, il y a une nature immobilière. En outre, il ne doit y avoir aucune forme de menace (légale ou de facto) pour le propriétaire, et encore moins de désavantages pour lui. Si tel est le cas, il ne peut être question « de se faire justice à soi-même ». De plus, cette règle ne s’applique que si l’objet ou l’animal a atterri par inadvertance sur la propriété de quelqu’un d’autre. Un acte délibéré du propriétaire ou d’un tiers exclut l’application de cette disposition.

Le propriétaire d’un bien immobilier doit en outre tolérer que son voisin ait accès à cette propriété si cela est nécessaire pour réparer ou entretenir une construction ou une clôture non commune. Toutefois, le propriétaire en question peut refuser s’il a des raisons légitimes, par exemple pour des raisons de sécurité. Un refus peut constituer une raison suffisamment sérieuse aujourd’hui, mais ne plus l’être quelque temps plus tard.

Le livre 3 a confirmé, mais aussi étendu le droit d’échelle. Cette extension a lieu dans le champ d’application matériel du droit d’échelle. Dans le Code rural, le droit d’échelle était interprété de manière restrictive et ne pouvait s’appliquer, par exemple, à la construction d’une haie ou d’un mur non mitoyen. Désormais, le droit d’échelle s’applique aux travaux de construction et non plus seulement aux travaux de réparation (« travaux de construction ou de réparation »).

 

4. Servitudes

Les dispositions légales relatives aux servitudes ont été grandement modernisées. Les notions bien connues de fonds « servant » et fonds « dominant » ont été conservées, mais doivent désormais être interprétées au sens large: elles comprennent non seulement le terrain, mais peuvent également désigner des bâtiments ou des plantations.

Une servitude peut désormais être établie au profit ou au détriment d’un simple bâtiment sans que le terrain appartienne à la même personne. Par conséquent, une centrale électrique, un pont, une digue, une éolienne, etc., même sans terrain sous-jacent, peuvent agir comme un fonds dominant ou servant.

Le livre 3 utilise le terme « propriétaire » tout au long de sa réglementation des servitudes. L’exposé des motifs indique clairement que cela doit inclure également tous les utilisateurs d’un bien immeuble. Le titulaire d’un droit réel de réjouissance, autre que le titulaire d’une servitude, peut accorder une servitude sur le bien immobilier sur lequel porte son droit réel, mais limitée à la durée du droit réel.

Il convient également de noter qu’une distinction est faite uniquement entre les servitudes « apparentes » et « non apparentes ». En revanche, la notion de servitudes perpétuelles et non perpétuelles a disparu.

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