En effet, depuis 2018 et l’introduction d’une nouvelle catégorie de systèmes multilatéraux de négociation – les marchés de croissance des PME – la cotation a rencontré très peu de succès auprès des PME. A titre d’exemple, EURONEXT Growth Brussels et Euronext Access Brussels comptent chacun moins de 10 membres. Les fondateurs et les familles craignent qu’en s’adressant au public, à l’occasion d’une entrée en bourse, elles ne perdent le contrôle de l’entreprise. Cette crainte de dilution de la propriété peut être temporisée en permettant de préserver un pouvoir décisionnel pour les actionnaires majoritaires. Le recours aux actions à vote multiple est une solution qui permet de continuer à façonner l’entreprise, tout en bénéficiant des avantages liés à la qualité de sociétés cotées en bourse.
L’action à vote multiple permet aux propriétaires de conserver leur pouvoir décisionnel tout en levant des fonds sur les marchés boursiers. Ces structures comprennent généralement au moins deux catégories d’actions distinctes, avec un nombre différent de droits de vote. Ce mécanisme d’action à droit de vote multiple est interdit en Belgique en ce qui concerne les SA et SRL cotées au contraire des sociétés non cotées. La Commission est d’avis que cela crée une concurrence inégale entre les PME des différents Etats membres où il est possible pour certaines d’entre elles d’avoir des actions avec droit de vote plural.
L’objectif de la directive est d’harmoniser les législations des Etats membres relatives aux structures avec actions à droit de vote multiple. Il s’agit d’une harmonisation minimale, qui vise à rapprocher les législations des différents Etats sans les rendre identiques. Tout en prévoyant la mise en place de garanties pour assurer la protection des actionnaires minoritaires et des intérêts de la société. Ces garde-fous impliquent que les États membres veillent à ce que toute décision d’adopter une structure d’actions à droit de vote plural, ou de modifier cette structure lorsqu’elle a un impact sur les droits de vote, soit prise à la majorité qualifiée lors de l’assemblée générale des actionnaires.
Les Etats membres doivent aussi limiter la pondération des droits de vote des actions à droit de vote multiple. Cette pondération peut se faire soit lors de la conception des actions, soit lors l’exercice des droits de vote multiple pour certaines décisions.
Il faudra donc adapter le Titre VII du CSA dans les deux ans qui suivent l’entrée en vigueur de la directive. Cette entrée en vigueur aura lieu le 20e jour suivant celui de sa publication au Journal Officiel de l’Union Européenne. Cette adaptation permettra aux SA cotées et aux SRL cotées d’émettre des actions à droit de vote multiple.
Les entreprises qui souhaitent entrer sur un marché de croissance devront répondre à un cahier de charges en matière de transparence. Ces sociétés doivent publier un prospectus ou un document d’admission contenant la structure de leur capital (y compris les titres qui ne sont pas admis à la négociation et les différentes catégories de titres et leurs spécificités). Les restrictions éventuelles au transfert de titres doivent également y figurer, de même que l’identité des détenteurs de droits de contrôle spéciaux, les restrictions de droit de vote et l’identité des actionnaires a droit de vote multiple.
Un rapport sur les effets de la mise en œuvre de cette directive devra être présenté dans les 5 ans qui suivent l’entrée en vigueur par la Commission au Parlement. Ce rapport reprendra le nombre de PME qui sont admises à la négociation avec des actions a voix multiples, leur secteur d’activités et les mesures de protection de investisseurs.
Il ne s’agit pas de la seule proposition de directive adoptée par le Conseil qui concerne les marchés de croissance. En effet, le Conseil a adopté le même jour une proposition de directive modifiant la directive 2014/65/UE afin de rendre les marchés des capitaux de l’Union plus attractifs pour les entreprises et de faciliter l’accès des petites et moyennes entreprises aux capitaux, et abrogeant la directive 2001/34/CE. Celle-ci vise à faciliter le développement et la fourniture de services de recherches réalisées par des entreprises d’investissement ou par des tiers et utilisées par ces entreprises d’investissement, leurs clients ou clients potentiels, ou qui leur sont communiquées. Ces communications ne peuvent être désignées comme des «recherches financées par l’émetteur» que si elles sont effectuées conformément au code de conduite de l’Union applicable aux recherches financées par l’émetteur. Sinon, il s’agit de communications commerciales.
Les États membres devront s’assurer que seules les sociétés dont la capitalisation prévisible s’élève au moins à 1 million d’euros avec un flottant de 10% seront admises sur les marchés règlementés. Dans les cas où cette capitalisation ne peut être évaluée, alors il est nécessaire que le capital et les réserves de cette entreprise, y compris le compte de résultat, du dernier exercice, atteignent 1 million d’euros.
L’émetteur d’un titre devra être informé et ne pas avoir formulé d’objection pour que son titre soit négocié sur une autre plateforme.
Les Etats membres disposeront de 18 mois après l’entrée en vigueur de la directive pour adapter leurs législations. L’entrée en vigueur aura lieu 20 jours après la publication au Journal Officiel de l’Union Européenne. Dans les 4 années qui suivent l’entrée en vigueur, la commission examinera les effets de cette directive sur les marchés de croissance.
Il est encore trop tôt pour anticiper les effets de cette directive sur les marchés de croissance de PME. Euronext Access Brussels et Euronext Growth Brussels n’ont connu que peu de succès jusqu’à présent, et rien ne dit que ces modifications vont changer le comportement des PME. La crainte de la perte de contrôle et le coût que représente une entrée en bourse reste un frein.
Contrairement au printemps qui n’attend pas l’hirondelle, les PME attendront sans doute encore un certain temps avant de rentrer sur les marchés de croissance.